Itinéraire de GTI : regards croisés sur AgriSTA et SystExt

Si les groupes locaux forment le gros de la force bénévole d’ISF, les groupes thématiques d’ingénieur⋅es (GTI) portent également de nombreux projets. Retours sur deux collectifs ayant marqué l’histoire de la fédération ces dix dernières années avec Vivien Bourgeon et Élodie Martin Abad d’ISF Agrista, Thibaud Saint-Aubin de la coordination nationale et Aurore Stéphant de SystExt.
Photo du groupe ISF AgriSTA lors de son échange international
ISF AgriSTA

Pouvez-vous revenir sur l’histoire de vos or-ganisations respectives ?

Vivien : ISF Agrista a débuté son existence en 2013 avant de se déclarer officiellement en association  en  2015.  Nous rassemblons des citoyen·nes et professionnel·les œuvrant pour la réalisation de la souveraineté alimentaire et de modèles agricoles respectueux des équilibres socio-territoriaux  et  écologiques. Le premier projet mené par Agrista a été un échange international entre pairs avec ISF Cameroun sur la thématique de l’évolution des relations entre agronomes et paysans, d’une posture de conseil expert vers une démarche d’accompagnement (1). Agrista a progressivement pris part à plusieurs collectifs, parmi lesquels la commission Agriculture et alimentation de Coordination  Sud, le CFSI, Commerce Équitable France (CEF), Pour une autre PAC et Horizonterre. À partir de 2018, nous avons commencé à réfléchir les transformations de l’agriculture par le prisme de l’alimentation et petit à petit le travail autour de la Sécurité sociale de l’alimentation a pris de l’ampleur, jusqu’au recrutement de notre première salariée début 2022.

Aurore : SystExt est né en 2009 et a été cofondé par des membres de la coordination nationale d’ISF. L’équipe a par la suite été déclarée en association en 2013. Elle faisait à l’époque partie  des trois premiers GTI de la fédération avec un groupe traitant de la question de l’eau et un autre de l’énergie (2). La création des GTI correspondait à l’époque à une volonté au sein de la fédération d’investir du temps bénévole sur des thématiques particulières au-delà de leur déploiement ponctuel dans le cadre d’activités d’éducation au développement. Dès la création de SystExt, des personnes issues de groupes locaux (GL), de la coordination nationale mais aussi des personnes qui n’étaient jamais passées auparavant par ISF s’y sont engagées.

SystExt a quitté ISF en 2019, peux-tu revenir sur les évolutions qui ont mené à cette décision ?

Aurore : Le fait est que la thématique minière n’a jamais été une priorité au sein de la fédération. Cela est dû notamment à la cartographie des GL, principalement implantés dans des écoles d’agronomie, de mécanique ou d’énergie. Est apparue par la suite une question plus pratique : avec une activité en croissance exponentielle, SystExt a de plus en plus développé de gros partenariats, notamment à l’international. Cela a rendu plus difficile le lien avec les GL, faute de temps à dédier à l’éducation au développement. Ces points d’achoppement ont été  accentués par des questions budgétaires de sorte que la décision de quitter la fédération a été prise en 2019. Avec le recul, je pense que les souhaits des bénévoles étaient différents de l’investissement nécessaire à apporter à l’activité des GL demandé par le fonctionnement d’ISF. SystExt garde cependant un lien très fort avec les étudiant⋅es ingénieur⋅es mais est à présent plus tourné vers les universités, et intervient sur des questions beaucoup plus larges.

Thibaud : Il ne faut cependant pas oublier les réalisations qui ont été faites pendant dix ans : deux week-ends thématiques sur les ressources minérales (l’un sur l’énergie et l’autre sur les métaux), des ateliers et articles fréquents durant les temps fédéraux, une participation active à la campagne Une Seule Planète, l’utilisation d’un projet de SystExt dans les Forums Régionaux pendant plusieurs années. L’éclosion de SystExt au sein de la fédération nous a permis de faciliter la création d’un large réseau qui été entretenu et embelli par la suite.

Quel  est  le  lien  entre  la  fédération  ISF  et Agrista ?

Vivien : Agrista a été lancé par des bénévoles issu⋅es des GL de la fédération et nous continuons d’intégrer régulièrement des militant·es issu·es des GL. Depuis quelques années, notre recrutement s’est diversifié avec des militant·es qui ne sont pas issu·es d’ISF, notamment en lien avec le projet de Sécurité sociale de l’alimentation (SSA).

Élodie : Le risque serait qu’avec la place prise par la SSA dans le collectif, les liens avec la fédération se distendent. Une grande part des nouvelle·aux adhérent·es venu⋅es pour ce projet ne sont en effet pas passé·es par ISF. Il y a donc un enjeu de tuilage et de formation aux outils de la fédération. Un équilibre a toutefois été trouvé au niveau de la gouvernance d’Agrista, un bureau à quatre permettant ainsi de suivre tous les projets en cours. Être membre de la fédération ISF permet de se nourrir de ce qui se passe dans les GL et le rayonnement que procurent les temps de formation est intéressant pour Agrista. Notre présence lors des jurys FAICS permets aussi d’infuser notre vision des questions d’agronomie sur les projets internationaux d’ISF.

Vivien : Les liens entre Agrista et la fédération sont forts. Parmi les exemples les plus importants : la représentation de la fédération par Agrista au conseil d’administration de CEF, la coorganisation des week-ends thématiques 2020 (Souveraineté alimentaire) et 2021 (Commerce équitable), l’accréditation par la fédération de plusieurs membres d’Agrista pour se rendre aux COP ces dernières années, le portage du poste salarié sur la SSA par la fédération ou encore l’intervention à l’école VetAgro Sup de Clermont-Ferrand en partenariat avec l’équipe FormIC. Entre Agrista et la fédération c’est une relation gagnant-gagnant !

Quelles évolutions voyez-vous pour vos organisations ces prochaines années ?

Aurore : SystExt ne manque pas de travail ! La thématique des mines n’émerge plus mais est en explosion. Nous sommes à présent reconnu⋅es pour notre expertise technique sur les sujets des impacts environnementaux et sanitaires de la mine et de l’évolution des techniques minières. Notre objectif est de rester dans notre domaine de compétence en poursuivant notre travail d’accompagnement de la société civile sur la question de l’extractivisme minier sans pour autant empiéter sur d’autres structures. Nous ne prétendons pas en effet avoir une expertise  sur les questions économiques et sociales. SystExt continuera donc cet accompagnement tout en travaillant de plus en plus à interroger les modèles métalliques de nos sociétés.

Vivien : Avec l’embauche d’une salariée dédiée à la SSA, ce projet va conserver une place importante dans les prochaines années. La fusion en cours des deux plateformes inter-organisations sur les enjeux agricoles et alimentaires, Pour une autre PAC et Plateforme citoyenne pour une transition agricole et alimentaire, nous offrira de nouvelles opportunités de faire entendre notre voix aux côtés de nos partenaires. Agrista continuera de représenter la fédération au sein de CEF, où ISF occupe une place importante en tant que cofondateur du  commerce équitable en France en 1992 bien que la représentation soit rendue difficile par la professionnalisation croissante de ce collectif. Nous souhaitons également poursuivre la diffusion de notre Manifeste pour une formation citoyenne des agronomes, en lien avec l’équipe FormIC. Par ailleurs, des réflexions sont en cours pour envisager des sujets de travail en commun avec ReSET, au croisement des thématiques agricoles et énergétiques. Dans le temps long, d’autres pistes de réflexion pourront être lancées, notamment en lien avec SystExt sur la question du numérique dans l’agronomie, sur laquelle il n’y a pour l’instant que peu de réflexion. Évidemment tout cela n’est possible que par l’engagement de nos bénévoles c’est pourquoi nous invitons toutes les personnes intéressées par nos projets à nous rejoindre !

1. Le descriptif de l’ensemble des projets d’ISF Agrista est disponible à l’adresse https://www.isf-france.org/agrista
2. Qui deviendra le GTI ResET

25 juillet 2022
Benjamin Allonier, co-trésorier de la fédération
Thématique