Les Rencontres Internationale de l'Éducation au Commerce Équitable, retours et témoignages !

Les 9 et 10 février 2018 près de Paris, avait lieu la 4e Rencontre Internationale de l’Éducation au Commerce Équitable (RIECE), autour du thème « Jeunesse et commerce équitable : de la sensibilisation à l’action ». Y ont participé cinq représentants d’Ingénieurs sans frontières : Sasha, chargée de mission, Coura, volontaire en service civique, ainsi que Noah, Jean et Elisa, membres bénévoles. Voici quelques réflexions sur le commerce équitable que la rencontre nous a inspiré.
Table ronde « Le défi de l’intégration des jeunes dans les organisations de distribution, d’éducation et de plaidoyer (ODEP) »
@Elisa

Pourquoi nous souhaitons nous engager pour le commerce équitable?

Jean, membre du groupe local Ingénieurs sans frontières Nord :

Je m'intéresse vraiment au commerce équitable depuis la Quinzaine du commerce équitable de l'année dernière, par rapport à ce que nous avaient dit les étudiants en deuxième année de l'école, et qui avait suscité ma curiosité par rapport à ce commerce que je ne connaissais que très peu... Mais c'est vite apparu comme une évidence avec les questions que je me posais depuis longtemps, à savoir d'où viennent les produits, qui les transforme, comment expliquer que toutes ces denrées du "Sud" nous parviennent en si grande quantité, de manière si peu chère ? Pourquoi ne sait-on jamais tout ce qu'il y a derrière le commerce ? Pourquoi n'y pense-t-on pas ?

Noah, membre du groupe local Ingénieurs sans frontières Nord :

C'est un moyen concret de lutter contre les inégalités que génère notre système économique mondial. Le commerce équitable porte des valeurs où l'humain est mis en avant, il permet aux producteurs de réaliser leurs projets et de s'épanouir ( via les primes de projets ). Pour moi, consommateur, le commerce équitable incarne vraiment l'expression " Acheter c'est voter ", voter pour une répartition des richesses plus justes. 

Elisa, membre de l'équipe d'accompagnement Partenariats Internationaux :

Pour moi, la démarche du commerce équitable redonne de l’espoir pour un modèle économique mondial plus juste. D’autant plus que désormais, le commerce local, au Nord, est également pris en considération dans la notion de commerce équitable, ce qui lui donne davantage de poids – jusqu’en 2014, seuls les produits importés du Sud vers le Nord étaient concernés (source).

Tout le monde se retrouve alors touché par les enjeux du commerce équitable, et peut s’y engager individuellement ou en groupe : acteurs de la solidarité internationale, consommateurs et producteurs, au Nord et au Sud.

À travers des documentaires, j’ai pu constater que le commerce équitable avait un impact qualitatif notable sur les familles productrices impliquées : leurs conditions de vie en sont améliorées.

Toutefois d’un point de vue quantitatif, la part du commerce équitable dans le commerce mondial reste très faible. Il me semble que c’est en partie parce qu’au Nord, le concept est supporté par des personnes déjà engagées dans des associations de développement durable en particulier, mais très peu connu du large public, ou alors jugé peu prioritaire. C’est là où intervient l’éducation au commerce équitable, objet principal de la RIECE et un des piliers majeurs définissant le commerce équitable. J’ai moi-même été sensibilisée au sujet lors de la Quinzaine du commerce équitable l’année où j’ai rejoint mon groupe local.

J’ai aussi entendu que la certification est difficile à obtenir pour les petits producteurs, notamment car son prix est élevé, ce qui constitue une autre entrave à l’essor du commerce équitable.

Coura, volontaire en service civique à Ingénieurs sans frontières:

Je ne suis pas vraiment engagée dans le commerce équitable dans le sens où je n’ai jamais fait d’action ni ne me suis dit que j’allais « consommer plus juste ». Dans l’idéal le commerce équitable est ce qu’il faut faire mais on ne le fait pas toujours ; même en étant conscient que son choix peut influencer, on va souvent vers la facilité. Dans mon pays,  la Mauritanie presque tout ce que l’on produit est exporté et il ne reste pas beaucoup de quantité pour la population ; on se retrouve alors à consommer des produits qui viennent d’autres pays comme la Chine. Donc le problème ici n’est pas que l’on ne consomme pas local mais plutôt que la politique commerciale du pays nous en empêche. Je pense alors que le commerce équitable est un bon moyen de contrer tous ces problèmes liés au commerce mondial.

 

Notre engagement pratique : ce que nous faisons au quotidien, dans nos groupes, nos villes…

Jean :

Aujourd'hui, j'achète équitable, j'essaie d'en parler à ma famille, d'utiliser un peu d'humour pour le partager autour de moi... Dans notre groupe local, c'est aussi devenu systématique et naturel d'acheter équitable (mais peut-être qu’on n'en parle pas assez), en revanche ça ne dépasse pas notre école.

Noah :

Je le vis surtout à travers Artisans du Monde. Parce que j'y ai fais mon stage mais même au delà de ça, si je veux des produits équitables j'irai chez Artisans du monde et non pas en grande distribution (notamment parce qu'on ne trouve de l'artisanat équitable que chez eux ). J'ai vraiment assimilé le commerce équitable avec Artisnas du monde, un peu trop d'ailleurs ! Car s'ils font un énorme travail d'éducation et de plaidoyer c'est loin d'être le plus gros revendeur de produits équitables. 

Elisa :

Lorsque j’étais encore active dans mon groupe local, on avait lancé une épicerie bio-équitable dans notre résidence étudiante, et pour la Quinzaine du commerce équitable, on organisait des ventes de cafés, thés et chocolats équitables. L’objectif était de faciliter l’accès aux produits bio et équitables aux étudiants pour les y familiariser, tout en engageant des discussions pour communiquer nos avis et connaître les leurs sur la question. L’initiative avait touché une part des élèves et professeurs, mais là encore je pense que ça n’a pas été suffisant pour sensibiliser la majorité de notre école.

Coura :

Dans ma vie quotidienne je ne fais pas attention aux produits que j’achète, l’essentiel c’est que ça soit bon. Mais dernièrement je me retrouve à lire les étiquettes des produit dans les magasins, ce que je ne faisais pas avant et je vais souvent aussi dans les rayons bio. Mais il faut dire que l’essentiel de ma consommation ne se trouve pas en magasin ; les plats que l’on fait chez moi nécessitent des produits que l’on vend dans les magasins africains.


Ce que nous avons préféré à la RIECE et les questionnements qui restent en suspens

Jean :

Le positif, c'était l'organisation et la participation de tant de personnes de structures différentes, les gens qui débutent leur engagement et les gens qui connaissent les enjeux dont on parle depuis longtemps, le point de vue des producteurs internationaux, leur témoignage. J'ai bien aimé le temps de débat sur les labels (comment élaborer un label « École de commerce équitable »).

Le négatif, c'est que la rencontre n'avait pas prévu de temps de débat long, qui aurait pu amener à interroger de manière profonde le fairwashing, ou blanchiment éthique, dont on a parlé. Il n'y a pas eu de temps prévu sur contre quoi on se bat quand on s'engage dans le commerce équitable. On n'a pas fait de lien avec les causes qui aboustissent au développement d'un commerce équitable... car s'il existe, c'est bien car il y a un commerce inéquitable, et celui ci, comment l'explique-t-on ? J'ai eu une discussion à un moment qui a fait surgir cette question : doit-on choisir entre décroissance et commerce équitable? est-ce compatible? Je pense qu'il est indispensable d'avoir un temps de débat là-dessus... d'interroger les limites du commerce équitable, de voir dans quel contexte actuel il se place.

Noah :

Ce que j'ai préféré : le premier temps du week end, la présentation de toutes les personnes présentes et les entités associatives auxquelles elles appartenaient. C'est peut-être ce qui est le moins en rapport avec le commerce équitable mais c'est vraiment ce qui a permis les rencontres ! J'ai été surpris par deux choses, la grande variété d'associations présentes et le nombre d'associations étudiantes. Je ne m'imaginais pas du tout qu'un tel tissu associatif orbitait, de près de ou de loin, autour du commerce équitable.

Mais j'y suis allé en oubliant un peu (trop) le terme " éducation " et j'ai porté moins d'intérêt à certains ateliers très spécifiques, liés à la création d'outils pédagogiques. A part établir le contact avec des producteurs pour un projet à l'international, je n'avais pas d'autres attentes et elles ont été satisfaites ! 

Elisa :

La Rencontre a été très enrichissante et m’a permis d’avoir un aperçu de différentes organisations du Nord et du Sud œuvrant pour l’éducation au commerce équitable, et les actions qu’elles menaient. J’y ai appris pourquoi et comment sensibiliser les jeunes : plus tôt les personnes sont familiarisées avec le commerce équitable, mieux elles seront enclines à adopter une consommation responsable, et promouvoir ses enjeux à leur tour.

La RIECE étant axée sur la sensibilisation de la jeunesse, j’aurais également en savoir plus sur l’éducation à destination d’autres publics – mais il aurait alors fallu prévoir un ou deux jours de plus !

Coura :

Ce que j’ai le plus aimé à la RIECE, c’est le débat que l’on a fait en fin de journée sur l’engagement dans le commerce équitable et comment ils faisaient bouger les choses chez eux. Ces deux moments m’ont beaucoup fait réfléchir sur le commerce équitable et comment il se développe dans différents pays, mais aussi les enjeux et les perspectives qui y sont associées.

 

Le commerce équitable au sein de nos groupes et équipes : ce que ça nous donne envie de faire

Jean :
La révolution, ça c'est sûr ! Par rapport au temps que nous avons, ça donne envie de mettre en place plus de temps de discussions lors de la prochaine Quinzaine du commerce équitable, de se rapprocher ou de renforcer nos liens avec le groupe local Artisans du Monde Lille. De montrer que ce mouvement a de l'ampleur !

Elisa :

J’aimerais si possible aborder le sujet au sein de l’équipe Partenariats Internationaux lors de nos « réflexions de fond ». Et surtout encourager les projets à l’international en partenariat avec des acteurs du commerce équitable, ou bien que les groupes locaux qui réalisent leurs projets de solidarité internationale se servent de leurs expériences pour approfondir leur vision du commerce équitable, comme l’a fait le groupe local Ingénieurs sans frontières de Bordeaux par exemple au Bénin.

Coura :

Cela m’a surtout donné envie d’en parler autour de moi. Avant de me lancer dans une quelconque révolution, j’aimerais en savoir encore plus, mieux comprendre le fonctionnement du commerce équitable et les actions de ceux qui s'y engagent. En maîtrisant cela, pourquoi pas après faire une rencontre ou un événement pour sensibiliser et informer sur le sujet.

 

 

La RIECE a été pour nous une bonne introduction aux acteurs de l’éducation au commerce équitable et aux actions concrètes mises en œuvres. Nous nous posons cependant encore beaucoup de questions sur les réalités du commerce équitable : sur les obstacles qui freinent son développement ou encore sur ses dérives. À approfondir lors de nos actions et réflexions futures…

 

1 mars 2018
Elisa Pheng, membre de l'équipe Partenariats Internationaux
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