« Les jeunes sont acteurs et actrices de la solidarité internationale »

Arthur Beauté, coordinateur du programme « Place aux Jeunes ! », nous a présenté cette initiative née il y a 4 ans, et les enjeux de renouvellement générationnel du secteur associatif.
Place aux Jeunes
© QualimeraProd et E&D

En quoi consiste le projet « Place aux Jeunes » ?
« Place aux Jeunes ! » est né dans la commission « Jeunesses et Solidarité internationale » de Coordination SUD. Cette commission offre un espace de rencontre entre les associations de jeunesses, d’éducation populaire et de solidarité internationale. À l’origine, la commission a été créée sur la base du constat que les organisations françaises de solidarité internationale étaient largement vieillissantes et pas forcément outillées pour accompagner des jeunes bénévoles. Le projet a permis de doter la commission de moyens, en développant les activités de formation, d’accompagnement, et d’échange de pratiques pour soutenir les organisations dans le renforcement de la participation des jeunes dans leur projet, leur structure, leur gouvernance. Ces activités sont accompagnées d’un plaidoyer qui vise à offrir un cadre favorable à la participation des jeunes dans les politiques publiques de solidarité internationale. Pour nous, cela signifie favoriser la participation des jeunes directement dans l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi des politiques publiques.

Pourquoi devrait-on donner plus de place aux jeunes dans les associations ?
Il y a un enjeu de renouvellement générationnel, nécessaire à la survie de certaines associations. Aussi, il faut casser cette fausse image de « la jeunesse désengagée ». Quand on regarde les statistiques, c’est la catégorie la plus engagée avant les seniors. Mais dans beaucoup d’associations, il y a l’idée qu’on va apprendre aux jeunes, qui sont vu·es comme des bénéficiaires qu’on va éduquer, qu’on va aider. Cette approche crée des barrières à leur engagement. Il y a aussi ce besoin de renouvellement des pratiques pour s’adapter aux défis actuels et aux nouvelles formes d’engagement citoyen. On sait que les jeunes, en arrivant dans des structures, apportent aussi un regard rafraîchissant, car quand on est « le nez dans le guidon », on manque de capacité à prendre du recul sur ses pratiques et sur la vision portée par son organisation. Ça permet aussi de suivre l’évolution du monde. Des sujets comme le genre ou les enjeux décoloniaux ne sont pas portés de la même manière aujourd’hui. Ce ne sont pas forcément des incompatibilités, car souvent il y a des envies d’avancer ensemble sur des sujets très similaires malgré des méthodes différentes. Mais ça ne doit pas empêcher non plus que les jeunes agissent de manière indépendante, en créant leurs propres associations par exemple.

Comment une association peut-elle agir pour mieux impliquer des jeunes ?
Je dirais qu’il faut partir des envies et des motivations des jeunes. Si proposer des missions précises peut permettre d'initier un engagement associatif, il faut s'assurer que ces missions ne sont pas le seul cadre possible d'engagement des jeunes au sein de la structure et que la volonté de les intégrer ne vise pas seulement le remplissage de besoins spécifiques. Il faut également leur faire une place, si iels le souhaitent, dans les espaces de décisions.

Quelles sont les principales caractéristiques des associations en demande d’accompagnement ?
Les demandes viennent d’associations qui pensent que ce qu’elles ont apporté dans la solidarité internationale mérite de perdurer. Les anciennes générations ont du mal à appréhender les nouvelles formes d’organisation des jeunes. Il n’y a plus un mode d’engagement dominant, affilié à une structure de long terme, où on construit quelque chose avec un rapport presque identitaire. Aujourd’hui il y a de nouvelles formes, moins affiliées, car beaucoup de collectifs informels se créent spontanément, parfois sur des causes de court terme ou des projets uniques. Donc on accompagne ces associations, car on ne pense pas du tout que le modèle associatif soit délaissé par les jeunes.

11 juillet 2023
Propos recueillis par Edouard de Matteis, chargé de projet EPIC
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