Projet Climat : les premiers résultats comparatifs Chambéry/Lomé

La communauté scientifique, à travers le GIEC, s'accorde à dire que le dérèglement climatique est très probablement d'origine humaine. Pour éviter un réchauffement global de plus de 2°C qui aurait des conséquences désastreuses sur l'humanité, il est nécessaire de réduire nos émissions. Pour cela, il faut pouvoir les compter. Dans cette optique, Ingénieurs sans frontières Savoie, l'association Visions Solidaires et des étudiant.e.s togolais de L'ESTBA à Lomé se sont associés pour réaliser les bilans des émissions de gaz de leurs écoles respectives.
L'équipe impliquée dans le projet climat
L'équipe impliquée dans le projet climat
Crédit : TIGOSSOU K.A. MIDAS

Depuis plus d'un an, Ingénieurs sans frontières Savoie s'est engagé dans un projet en partenariat avec des étudiants de l'Ecole Supérieure des Techniques de Biologie Appliquée (ESTBA) de Lomé, encadrés par l'association Visions Solidaires. Ce projet, le projet climat, consiste notamment à réaliser des bilans d'émission de gaz à effet de serre (GES) des campus respectifs des étudiant.e.s, de réflechir à des solutions en accords avec les grands enjeux climatiques, d'en débattre et d'agir en conséquence. (Voir les résultats sont présentés ci dessous).

 

Qu'est-ce qu'un bilan des émissions de gaz à effet de serre ?

 

De nombreuses études ont permis de connaître les émissions liées à chaque activité humaine. Elles prennent en compte toute la chaîne de production et les différents gaz émis (CO2, CH4, etc.). Grâce à ces données, il est possible de comptabiliser tous les déplacements, les matériaux consommés, les kilowatts-heure d'électricité utilisés, etc. qui sont nécessaires au bon fonctionnement de l'école ou du campus. Pour récupérer ces informations, les étudiant.e.s cherchent dans les documents et les factures administratives, ils distribuent des questionnaires sur les habitudes de chacun et en dernier recours, ils prennent des hypothèses.

Il faut aussi définir un périmètre d'étude, dans le temps et dans l'espace - Ici, l'école Polytech Annecy-Chambéry / année 2012-2013 [1], et l'ESTBA Lomé / année 2014-2015 - et dans les émissions prises en compte. Par exemple, les repas pris au restaurant universitaire sont comptabilisés mais ceux dans un autre restaurant ou au domicile des étudiant.e.s ne sont pas comptés.

Il faut bien garder en tête qu'un bilan GES sert à comptabiliser les émissions pour mieux les réduire. La définition du périmètre est aussi liée au domaine de responsabilité des acteurs et aux changements qu'ils peuvent apporter. Dans notre cas, le bilan nous donnera plus ou moins l'impact sur l'effet de serre de la formation d'un.e étudiant.e pendant une année à Polytech Annecy-Chambery et l'ESTBA. Ces deux écoles comptent approximativement le même nombre d’étudiant.e.s.

Les étudiant.e.s français.e.s et togolais.e.s sont-ils de gros pollueurs ?

Les étudiant.e.s savoyards le sont évidemment plus que les étudiant.e.s togolais. L’étude menée durant trois mois par douze étudiant.e.s togolais.e.s et français.e.s a permis de conclure que l’émission de GES par étudiant.e à l’ESTBA est de 0,62 tonne d’équivalent CO2 alors qu’elle est de 2,8 tonnes d’équivalent CO2 à l’école de Chambéry en France.

D'après les experts, pour maintenir le réchauffement en dessous de 2°C, tous les habitants de la planète devront émettre en moyenne 1,6 téq CO2/an d'ici 2050 (selon les hypothèses). On constate donc que les étudiant.e.s français.e.s doivent drastiquement réduire leurs émissions alors que les étudiant.e.s togolais ont encore une marge de manoeuvre importante.

 

 

D'où viennent toutes ces émissions ?

Dans les deux cas, la répartition des émissions sont semblables.

Le plus gros pôle est les déplacements des étudiant.e.s vers et dans les campus. (73% des émissions à l'ESTBA, 62 % des émissions à Chambéry). Pour la Savoie, contrairement à ce que l'on pourrait croire, les déplacements journaliers (domicile-travail) ne représentent qu'un petit quart de ces émissions. Ce sont les autres déplacements : visites, stages, année ERASMUS, et surtout le retour des étudiant.e.s chez eux, la plupart n'étant pas originaire de Savoie, qui produisent la plupart des émissions de GES. Au Togo, ceci s’explique par le fait que plus de 90% du personnel de l’ESTBA et 70% des étudiant.e.s se rendent à l’école avec un moyen de transport motorisé. Même avec ce grand pourcentage d’émission, le poste des transports de l’ESTBA (Lomé) n’est que peu émetteur par rapport à celui de l’école Polytech’ Annecy Chambéry si l’on résonne en valeur absolue. Il ne représente en effet qu’un tiers de celui-ci.

Viennent ensuite les l’énergie des bâtiments - électricité et gaz (10% ESTBA, 17 % Polytech), l’alimentation (9% ESTBA, 10 % Polytech), les consommables (5% ESTBA, 1% Polytech), la construction des bâtiments et mobilier (3% ESTBA, 10% Polytech).

Cette étude sur le bilan des émissions de GES de l’ESTBA n’est pas une fin en soi. Les résultats de l’étude doivent à terme permettre de mieux penser de façon écologiquement responsable le développement des infrastructures de l’université et de conscientiser les étudiant.e.s et le personnel universitaire aussi bien à l’ESTBA qu’à l’école Polytech’ Annecy Chambéry de France sur l’impact de leurs actions quotidiennes sur le changement climatique.

Comment changer les choses ?

En France, les solutions à mettre en place à court terme concernant les déplacements sont le covoiturage, les mobilités douces et la visioconférence. A plus long terme, on peut se poser la question de la localisation des bâtiments dans la ville, des années d'études à l'étranger, de privilégier une intégration des étudiant.e.s « locaux ». Au Togo, une sensibilisation auprès de leurs collègues ayant une moto pourrait être faite pour qu’ils transportent plus régulièrement ceux qui n'en ont pas, en échange d’une participation aux frais engendrés et la promotion de l’utilisation de vélo pour les courts trajets entre les amphis.

Pour ce qui est des sources alimentaires sur les campus, la recommandation pour les étudiant.e.s français est de manger moins ou manger différemment notamment en luttant contre le gaspillage alimentaire. Ceci réduirait de près de 10 % les denrées utilisées sans changer les habitudes dans un premier temps. La réduction de la consommation de protéines animales dans les assiettes est également une solution long terme à adopter. Il en est de même au Togo (voire la vidéo ci-dessous). Ce changement affecte des traditions culinaires et des équilibres alimentaires qu'il faut faire évoluer avec intelligence et précaution (sans parler de l'adaptation économique, qui est un frein évident à n'importe quel changement à grande échelle).

De plus, les étudiant.e.s de l'ESTBA veulent sensibiliser les revendeuses d’aliment du campus afin qu’elles évitent l’usage des sachets plastiques pour favoriser les emballages papiers.

Le rapport final est en cours d'élaboration au Togo. Les recommandations de l’étude feront plus particulièrement l’objet d’une campagne de sensibilisation à l’ESTBA et à l’École Polytech’ d’Annecy Chambéry d’octobre à décembre 2015, en amont de la 21e Conférence des Parties (COP21) qui a lieu à Paris.

Découvrez l'interview des étudiant.e.s impliqués sur le projet lors de la restitution du bilan à Lomé, 31 juillet 2015 :

 

 

Deux articles détaillant le bilan de l'école Polytech Chambéry et de l'ESTAB sont également disponibles en pièce jointe..

 

[1] L'école d'ingénieur Polytech Annecy-Chambéry en Savoie forme ses étudiant.e.s à la réalisation de bilan d'émission de GES (appelé communément Bilan Carbone). Dans le cadre d'un projet de fin d'étude, deux d'entre eux ont réalisé le bilan GES de leur école. Les membres d'Ingénieurs sans frontières Savoie ont donc utiliser ce bilan pour le projet.

3 août 2015
Équipe EADSI
Groupe ISF